Dire que je pensais vous prendre par surprise... Skinny.lOve

Il doit y avoir d’autres informations. C’est obligatoire ! Ces sorciers sont certes stupides, il arrive qu’un éclair de lumière, d’intelligence presque – si si – les traverse et les pousse à faire les bons choix, les bonnes recherches. Pourquoi est ce que je ne trouve rien d’autre ?
Repoussant le carnet que j’ai entre les mains, éloignant de moi cette écriture grasse et maladroite de ce crétin qui me prend pour un des leurs, je pousse un soupir exaspéré. Je sais parfaitement que cette reine est reine, bandes d’abrutis ! Je sais qu’elle est vieille – plus que ça même – je sais qu’elle vide les corps humain de leur sang, je sais que c’est…un monstre !

« Alors, t’as ce que tu voulais ? »
« Je, non, ouais si. Merci. Sympa. »
« Pas d’quoi ! Au fait, ton nom déjà ? »
« …Appelle moi Aod’ ça ira bien. »
« …Ton nom, ton nom de famille. Aod’ ? »


Le claquement de la porte une fois que je suis parti en courant le fait sursauter mais au lieu de se méfier, il continue de me chercher dans la pièce. Fichtre. J’ose même espérer qu’ils ne sont pas tous comme ça, ça deviendrait honteux d’avoir de tels boulets comme adversaires.
…et puis je le sais, tous ne sont pas aussi dépourvus d’intelligence. Certains sont sournoisement plus sages, terriblement plus réfléchis, stratèges et machiavéliques comme on n’imagine pas.

Je dévale les escaliers de cette bâtisse, frappe amicalement sur l’épaule du sorcier que je croise à l’entrée dans une hypocrisie déconcertante et réussis à rejoindre l’extérieur. Ouf. Tout ça pour rien quand j’y pense…rien. Pas une information supplémentaire. Rien qui ne m’explique pourquoi la reine porte cette haine contre les sorciers. Rien de plus que des excuses toutes faites, des on-dit déjà écrits, des phrases de récits grotesques que personne ne cherche à valider.
Moi je veux savoir. La reine des vampires…quelle excellente alliée cela ferait ! Sauf que je ne vais pas m’allier à n’importe qui. Elle pensera la même chose non ? Je ne vais pas prendre le risque de me faire vider de mon sang pour une créature qui n’en vaut pas la peine, qui n’a pas de réels buts.

« …Tu nous quitte déjà, Aodhán ? »
Et merde. J’inspire un grand coup, le plus discrètement possible, et me retourne en esquissant un sourire le plus crédible possible. « J’ai…ouais, un rencard. »
« Hum, et tes recherches sur les vampires ? »
« Shhht ! Dans une rue hu…moldu, c’est peu prudent de parler de ça ! »
« Je t’en prie, les moldus sont encore plus fans de ces enfoirés sanguinaires que nous ! Et puis quoi, ils savent tout non ? Ce que l’on veut, c’est se défendre. Les crever de pieux et les voir hurler comme tous ces ‘chasseurs’ que je décapiterais un par un si… »
« Ça va ça va ! J’te suis. Ils…méritent en effet le pire des sorts je ; me renseigne sur la saleté reine des vampires. T’en sais quelque chose. Je veux dire, de plus que dans les notes que j’avais là ? »
« Hum, non. Mieux vaut pas l’approcher seul…elle t’intéresse ? Tu veux te la faire peut être ; à toi seul ? Haha. »
« …Qui sait. J’en suis peut être capable. »

Il me lâche, enfin. Je continue de sourire encore habité par mon – mauvais – jeu de comédien jusqu’à ce que je bifurque au carrefour suivant. Enfin tranquille !
Je m’adosse contre un mur humide et froid en portant une main à mon front. Le coin grouille de sorciers, je suis au cœur même d’un de leurs quartiers et pourtant l’émotion qui me bouleverse le plus, m’enserre le cœur et me donne cet arrière gout d’amertume n’est pas la peur : mais bien la déception.
Je dois m’approcher de cette vampire et je n’ai pas la moindre idée de comment m’y prendre.

« T’es pas des nôtres de toute façon. Va donc la chercher et fais toi bouffer, ça débarrassera autant les chasseurs que les sorciers d’un poids ! Comment ils disent déjà ? Cracmol… »
Je secoue la tête et ferme les yeux en soupirant tout mon dédain pour ces insolents, ces irrespectueux personnages. Les parents d’Evely me voyaient comme une abomination ; certains humains aussi me voient comme une anomalie. Des chasseurs même, me considèrent aberration…
S’ils ont tous raison, si je dois accepter n’appartenir à aucun camp, à qui dois-je me fier ?
Plongé dans mes pensées, en jouant avec la baguette de ma mère d'une main nerveuse, je n’ai rien senti, rien vu, rien entendu…mais elles sont là.

Il avait l’air assez banal, ce sorcier. Il était plus grand qu’elle, ce qui n’était pas dur vu qu’elle ne mesurait qu’un mètre soixante après tout. Il n’était même pas imposant, ne dégageait rien de charismatique ou de dangereux. Un court instant, Merida fut déçue. Alors c’est ça, le sorcier de la prophétie qui est le seul à pouvoir la tuer ? Par Merlin, c’est une plaisanterie ? L’homme semblait fatigué, exténué, comme s’il se demandait ce qu’il devait faire. A côté d’elle, Odessa ne bougeait pas, ses yeux de chat fixés sur le mortel, n’attendant qu’un signe pour lui sauter à la gorge. Merida hocha la tête, et la vampire bondit, arrachant sa baguette des mains du sorcier pour le plaquer contre le mur avec facilité. Pitoyable … Il ne les avait même pas senties venir. Ainsi immobilisé, il ne pouvait plus bouger sous peine de grandes souffrances. Merida sortit de l’ombre, se plantant devant le sorcier inconnu, non sans le détailler de ses yeux d’acier. Normalement, c’était à elle de prendre la parole.

« Je n’aime pas beaucoup les curieux … Surtout quand c’est ma personne qui les intéresse. »

Merida se tenait bien droite, à peine éclairée par la lune. Quand Odessa était venue la voir, pour lui annoncer qu’un sorcier se renseignait sur elle, elle avait eu du mal à y croire. Pour quelle raison un sorcier chercherait-il à en savoir plus sur elle ? A moins qu’il ne soit le sorcier de la prophétie … Ses ordres avaient été rapidement donnés. Odessa et elle partaient s’occuper de ce fouineur dès le lendemain soir pour lui apprendre ce qu’il en coûte de s’attaquer à la reine des vampires. Elle n’est pas non plus n’importe qui, bon Dieu ! Elles avaient rapidement trouvé le sorcier, à qui un informateur d’Odessa avait donné rendez-vous à Godric’s Hollow pour leur permettre de le retrouver plus facilement. Elles l’avaient suivi dans les ténèbres de la nuit, et il n’avait même pas eu l’air de s’en rendre compte. Il n’était pas un adversaire à sa taille, ou alors il cachait rudement bien son jeu. Maintenant, il était plaqué contre un mur, immobile, à leur merci, et étrangement, elle rechignait à le tuer. Si elle faisait ça, ne risquait-elle pas de lancer la prophétie et de créer, quelque part, le sorcier qui la tuera ? Comme un de ses enfants, ou un neveu, une nièce, une pupille quelconque … Nom de Dieu, qu’elle détestait cette foutue prophétie. Avec un calme renversant, Merida toisa l’homme mortel, ne prenant même pas la peine de sortir ses crocs. Pourquoi faire, il sait bien qui elle est, vu qu’il fait des recherches sur elle, non ?

« Toi et moi, on va passer un deal, sorcier. Je pose les questions, et tu y réponds. Comme je suis généreuse, je vais te donner un conseil. Réfléchis à tes réponses, comme si c’était la dernière chose que tu disais de ta vie. »

La menace était on ne peut plus claire. Si les réponses ne convenaient pas à Merida, elle ordonnerait à Odessa de tuer l’humain. Cette dernière semblait d’ailleurs en piaffer d’impatience, comme si elle attendait que le mortel se trompe pour lui régler son compte. Merida laissa planer un court silence chargé de menaces, puis elle reprit la parole de sa voix la plus placidement lourde de sous-entendus.

« Mes questions sont simples. Je veux savoir qui tu es, pour qui tu travailles, auprès de qui tu t’es renseignée sur moi, mais surtout, pourquoi tu t’es renseignée sur moi. Car comme je l’ai dit, je déteste que les fouineurs. »

Elle coula son regard acier sur Odessa. La vampire avait l’air redoutablement dangereuse, comme ça, elle lui faisait penser à un chat sauvage. Peut-être le chat était-il l’animal-totem de son bras droit ? Ce n’était pas mauvais, comme symbolique, et ça lui allait assez bien. Mais bref. Si Odessa cachait difficilement son impatience, Merida restait aussi expressive qu’un lac ridé par le chant du vent. En fait, dans tout ça, une seule chose lui importait. Pourquoi fouinait-il sur elle ? Etait-il le sorcier de la prophétie ? Allait-il la tuer, ou était-il bêtement insignifiant ? Elle releva le regard vers lui, plantant ses yeux gris métalliques dans ceux de l’humain. Et brusquement, deux crocs jaillirent entre ses dents, la rendant plus menaçante encore. Comme si elle ne l’était pas déjà avec tout ça !

« Je t’écoute, la balle est dans ton camp. »

Tout se passe très vite. Brusquement. Comme à chaque fois que l’action implique des vampires de toute façon et pour être honnête si je fais partie des chasseurs, que certains de mes alliés sont donc déjà des buveurs de sang, je ne les avais jamais approché autant.
C’est en fait elles, qui m’accostent, pour ne pas dire me sautent littéralement dessus.
Étouffant un soupir de surprise et frayeur mêlées je n’ai absolument pas le temps d’insister sur la prise de la baguette que j’avais en main, celle-ci s’éloigne à plusieurs mètres de nous alors que déjà mes pieds quittent le sol. C’est seulement après, une petite fraction de seconde plus tard, que la douleur apparait.
L’étreinte solide, violente des doigts de la créature contre ma mâchoire fait craquer une première fois cette dernière et alors que je plisse les yeux sous la terreur du contexte, mes muscles se crispent avec force.
Je lutte, je n’ai pas le choix, je lutte pour empêcher mes lèvres d’articuler tout ce qu’elles meurent d’envie de dire. Mais je ne suis pas le genre sang froid…contrairement aux – désormais – deux êtres face à moi.

Serait-ce ?... D’après ses dires, je me trouve devant la reine. Cette reine mystérieuse, terriblement jolie, si dangereuse, la voici ? C’est elle ?
Je ne sais pas trop que penser. Les vampires aussi ont des petits conflits internes, il se pourrait qu’une rivale décide de jouer les reines pour une quelconque intention et ; non non. Je secoue la tête pour moi-même tandis qu’elle me fait comprendre que j’ai tout intérêt à coopérer. Soit, à la base c’est ce que je veux non ?
Je me bats pour pouvoir respirer correctement malgré la poigne de l’autre vampire – garde du corps dirons-nous – et pour calmer autant que possible les battements insupportables de mon cœur. Presque agressifs.

« Je ; madame nous sommes en plein quartier ennemis si jamais ils nous entendent ! » Madame ? Majesté ? Que dois-je dire merde ! Ne soutenant plus la douleur si proche de mon cou je porte une main au poignet de la première buveuse de sang et continue, avant que l’une d’elle n’ait un creux. « Je ne suis pas sorcier, je suis un chasseur, mais mes recherches ne concernent pas les nôtres…je tenais à vous rencontrer. Je peux vous être utile, autant que vous l’êtes à la cause anti-sorcier ! Vous êtes d’une influence indéniable et je trouvais intéressante l’idée de collaborer plus franchement avec nous, les chasseurs…je suis chasseur, je le jure. »

Mon regard me trahi néanmoins en glissant sur la droite, à la recherche de cet objet étrange. Elle est tout ce que j’ai gardé de magique de mes parents, cette baguette. Celle de mon père fut introuvable auprès de leurs corps mais celle-ci ne m’a jamais quitté depuis qu’ils sont partis.
Je déglutis en supposant qu’elles l’ont vu, puisque la première dame m’a gentiment désarmé en arrivant. Le souci c’est que je suis incapable de me servir de cette baguette, ce n’est en rien une arme à mes yeux, encore moins dans mes mains !

« Je me suis fait passer pour un des leurs afin d’avoir leurs informations vous concernant…mais ils n’en ont pas plus que nous ; kof ; croyez-moi, je suis dans votre camp… »

Peut-être un peu osée comme remarque, un brin audacieuse, mais n’est-ce pas la vérité ? Pour le peu que j’en sais, la représente des vampires, cette soi-disant reine, déteste les sorciers autant que nous. Ça suffit pour me faire penser que nous faisons partie de la même faction ;
J’esquive le regard de la furie qui s’accroche à moi et essaye de tenir un air un minimum crédible devant la souveraine et son incroyable calme. Ces immortels sont vraiment impressionnants, fantastiques.

L’humain ne les avait pas sentis approcher, ce qui était quand même normal. Elles étaient deux vampires, d’un âge assez conséquent tout de même, s’il avait pu les entendre arriver, c’est qui aurait eu des oreilles bioniques, au moins. Mais là, plaqué contre le mur par la main de fer d’Odessa, il semblait ne pas comprendre ce qu’il lui arrivait. Les yeux écarquillés, il les regardait tour à tour et semblait chercher quelque chose. Quelque chose … Comme sa baguette magique, par exemple. Puis quand Merida prit la parole, il la fixa avec surprise, semblant se demander si elle était vraiment la reine, ou une quelconque usurpatrice. Il s’attendait à quoi, à voir débarquer une harpie ou une stryge ? N’avait-il donc pas appris son cours qui lui disait que les vampires, êtres ô combien cruels, ressemblaient en tous points aux êtres humains, mis à part le fait qu’ils vivent la nuit, boivent du sang, et meurent d’un pieu de bois dans le cœur ? Il commença par se défendre, arguant qu’ils étaient en plein quartier ennemi. Tiens tiens. Quartier ennemi ? Godric’s Hollow étant un village sorcier, l’homme n’était pas vraiment chez ses ennemis, mais plutôt chez ses amis. Elle notifia soigneusement ce détail sur un mémo mental et le classa pour s’intéresser de nouveau à la conversation en cours. A l’entendre, il n’était pas un sorcier, mais un chasseur, qui faisait des recherches pour savoir ce que les sorciers savaient sur elle. Il eut même l’audace de dire qu’il pensait que ce serait une superbe idée que de la voir collaborer encore plus avec les antis-sorciers. Cette impudence lui fit légèrement lever les sourcils. Soit il le faisait exprès, soit il était le parangon de la bêtise humaine. Collaborer encore plus ! Elle finançait la Ligue comme pas permis, que voulait-il de plus, qu’elle se joigne à eux pour tuer des sorciers ? Alors ça, hors de question. Pas avec cette foutue prophétie qui disait qu’un sorcier bien spécifique serait le seul à pouvoir la tuer. Cependant, Odessa soulevait un lièvre très intéressant. Il avait cherché sa baguette du regard, ça n’avait échappé à personne.

Cependant, elle lui faisait étrangement confiance, à cet homme, même s’il avait eu l’audace de sous-entendre qu’elle pourrait faire plus pour la cause. Que croit-il, que ce monde-ci est tout rose, que les sorciers, les vampires, les loups et les moldus gambadent joyeusement ensemble ? Par Merlin, heureusement pas. C’était une vision qui déplaisait fortement à Merida, car dans ce genre de cliché, il y avait toujours une prairie herbeuse, un soleil radieux et des papillons partout. Franchement. Du soleil ? Un vampire sous le soleil ? Voilà qui met brusquement fin à la vision idyllique, la prairie serait entièrement recouverte de boyaux et de sang, voilà qui est un spectacle fort réjouissant. Bref. Ce que lui avait dit l’humain, sur le quartier ennemi, lui faisait toujours bizarre. Qui penserait un truc pareil alors qu’il est agressé par des vampires, sinon un homme qui ne peut utiliser la magie et qui se sait cerné par les sorciers ? C’était étrange. Elle lui faisait confiance pour ça, mais en même temps, elle ne lui faisait pas confiance, parce qu’il était un homme, avec une baguette magique. Allons bon, voilà que bientôt on allait l’accuser de misandrie ! Elle tourna légèrement les yeux vers Odessa pour lui faire signe de lâcher l’humain. Il ne serait pas malin qu’elle le tue d’un coup alors qu’il disait des choses si intéressantes, et l’homme semblait avoir de plus en plus de mal à respirer. Souffle court, respiration sifflante, ça ressemblait grandement à la mort par asphyxie tout ça.

« Bien. Admettons que vous êtes vraiment un chasseur, bien que pour l’instant je n’y croie pas du tout. Pourquoi un chasseur serait-il tant attaché à un bout de bois, surtout s’il ne sait pas s’en servir ? Souvenir familial, peut-être ? »

Merida releva légèrement la tête, et une étincelle dansa dans son regard. Si elle avait eu sa couronne de reine sur la tête, le rendu aurait été meilleur. Mais elle la trouvait trop lourde, trop m’as-tu-vu, et la laissait généralement posée dans sa salle aux souvenirs. De toute manière, tous les vampires savent que Merida est leur reine, il n’est nul besoin d’un machin en or pour le leur rappeler. Le coup du souvenir familial la ferait toujours rire. Elle, elle avait gardé les baguettes magiques de sa famille, et comme ça datait de l’an 400, elles avaient une valeur monstrueuse désormais. Mais Merida les gardait, comme preuve que les vampires étaient supérieurs aux sorciers. Après tout, aucun d’entre eux n’avait pu faire quoi que ce soit, alors qu’elle les avait tous tués, presque jusqu’au dernier. Il n’y avait que son grand frère qui avait survécu, et elle avait vaguement suivi le reste de la descendance des yeux. Bon, elle était maintenant affiliée à presque toutes les grandes familles. Black, Malefoy, mais surtout Potter, et encore plus proche, les Weasley, peut-être la seule famille de sorciers à peu près potable. Quel lamento des plus tragiques, n’est-ce pas ?

« Et pour quelle raison les chasseurs voudraient-ils avoir des informations sur moi ? Il me semble vous avoir entendu dire que vous espionniez les sorciers pour savoir ce qu’ils savaient sur moi, et qu’ils n’en savaient pas plus que vous. Serais-je donc la nouvelle victime des chasseurs ? »

La phrase, bien qu’innocente en apparence, était chargée de sous-entendus, de même qu’une lueur de menace brillait dans les yeux de Merida. Enfin, vu son ton et son regard, ce n’était pas trop une lueur, mais plutôt une étoile prête à s’embraser. Apparemment, ils étaient plus d’un peuple à chercher des informations sur la reine des vampires, et cela ne lui plaisait pas. Et d’un coup, cette atmosphère menaçante vola en éclats quand le bruit de la civilisation se rappela à eux sous la forme d’une voiture. Merida se retint de jurer. Ah les humains, quels êtres tapageurs ! Bien vite, son attention se reposa sur l’homme, moins menaçante qu’auparavant, mais toujours aussi attentive.

La vampire qui me tient contre le mur avec cette force – certes attendue mais – ô combien surprenante commence à perdre patience ; pour ne pas dire son sang froid. Ce serait quand même le comble. Ses doigts s’assurent de maintenir contre ma mâchoire une pression à la fois assez solide pour que sa prise ne fléchisse pas et à la fois modérée pour éviter de ; me tuer. C’est aussi simple que ça. La reine ne lui a pas donné l’autorisation de me rayer de la liste des vivants, elle doit obéir…fort heureusement.
Ça ne l’empêche pas, comme je le disais, de s’énerver. Par rapport à la baguette. A ce regard qui m’a trahit, à cette façon que j’ai de tenir à ce stupide objet. Plus je m’enfonce dans la lutte contre les sorciers, plus ma haine pour ces êtres grandi et pourtant mon existence en devient difficile, paradoxale, anormale. Je ne suis pas l’un des leurs, je ne l’ai jamais été…mais toute mon enfance on m’a dit que j’étais chez moi avec eux.
Je ravale difficilement le peu de fierté qu’il me reste et essaye de trouver les mots justes pour répondre à ce ton accusateur ; c’est ce moment là que la reine des buveurs de sang choisi pour ordonner de me libérer.
Physiquement du moins.

Lourdement mes pieds rejoignent le sol et je n’ai aucun réflexe pour anticiper ma chute : mes mains ne viennent pas me protéger au cas ou, mais se jettent à mon cou endolori tandis que j’étouffe une quinte douloureuse. Je ne perds cependant pas mon temps à suffoquer ma douleur car la présence de ces deux êtres désormais on ne peut plus face à moi est terrifiante ;
Je me redresse, laisse mon dos volontairement rejoindre le mur et les surveille d’un regard autant apeuré que méfiant.
Quelque chose me dit que, quoique j’articule, je vais me mettre en danger… Ai-je seulement le choix ?

« Non, les chasseurs ne vous veulent rien. C’est moi…juste moi. Nous avons essuyés une défaite cuisante dernièrement et j’ai voulu leur proposer de chercher un soutien plus direct mais ; personne ne m’a soutenu. Je fais mes recherches seul. » Mes yeux naviguent entre l’une et l’autre mais bizarrement, préfèrent se fixer sur la reine. Plus fascinante, moins sanguinaire ? Ne pas se fier aux apparences…mais quand même. L’autre a l’air buttée. « Vous êtes une ennemie redoutée des sorciers, j’ai pensé que du coup, ils avaient un maximum d’informations vous concernant…mes camarades chasseurs sont négligeant en terme de renseignements. Mais je me suis trompé, les sorciers n’ont rien. Je ne pensais pas…attirer votre attention comme ça mais, au moins je vous ai trouvé. »

Sourire nerveux – et plus encore – je lâche le col de mon vêtement et viens glisser une main contre ma nuque. J’ai chaud, c’est terrible, alors que la nuit est tombée et que la fraicheur de cette ruelle devrait me faire trembler. Mais j’ai chaud. Je suis anxieux, sur le qui-vive, et pourtant bien conscient de n’être en mesure de faire quoique ce soit si jamais elle décidait d’en finir avec moi…
Alors je détourne le visage et regarde à nouveau ce ridicule morceau de bois.

« …Souvenir familial, oui. Ça ne m’empêche pas d’être un redoutable chasseur ! Je n’ai jamais refusé de tuer un sorcier. C’est que, cet objet n’est pas pour moi une baguette de sorcier, juste un artefact d’un parent parti trop tôt. »

Me mordant la lèvre avec embarras, je reste tête baissée, fixant le sol, puis mes pieds. Je voulais simplement trouver auprès des vampires une véritable alliance ! Je ne sais pas franchement ce qu’ils font avec la ligue, je n’en fais moi-même pas partie. Je ne suis qu’un chasseur…juste chasseur.
Silencieux, immobile, presque fiévreux, j’attends. Une sentence, une parole, un jugement ?
Les bruits s’approchent puis s’éloignent, nous reviennent et nous alertent, mais je ne bouge guère. Ce n’est plus à moi de décider quoi faire…

L’homme s’était écroulé au sol et cherchait à reprendre sa respiration. Merida faillit hausser les sourcils. Il avait cherché des renseignements sur elle, et il semblait s’étonner que les vampires lui tombent dessus. Quelle contrepartie aurait-il préféré, une invitation à prendre le thé ? Le chasseur reprend sa respiration tout doucement, puis se redresse et se colle contre le mur, ce qui est stupide, puisque maintenant il ne peut plus vraiment fuir, coincé entre Merida et Odessa. En reprenant la parole, il articule difficilement que les chasseurs ont du essuyer une cuisante défaite il y a peu. Cela titille immédiatement l’intérêt de Merida. Ah oui ? Alors malgré le fait qu’elle finance allègrement ce groupe d’humains tueurs, personne ne la tient au courant des combats ? Rien ne laisse suspecter son irritation à cette nouvelle, du moins pour l’humain, dont les sens sont nettement plus atrophiés que ceux des vampires. Odessa doit la sentir, par contre, habituée qu’elle est à écouter les humeurs de sa reine pour ne pas se retrouver face à une mauvaise surprise. Une voiture passa en pétaradant, faisant immédiatement se retourner Odessa, qui marmonna quelque chose sur le besoin de compensation des êtres humains. Merida aurait plutôt appelé ça la course à la pollution, l’ode à la bêtise humaine.

« Une défaite cuisante. Quel genre de défaite cuisante ? Vous avez essayé de vous en prendre au roi des sorciers et vous vous êtes heurtés à sa garde personnelle ? »

Plus ou moins finement, Merida allait à la pêche aux informations. Oh, de toute manière elle n’allait pas cacher que le sujet l’intéressait, non plus. Après tout, l’humain avait bravé la mort pour la rencontrer et se targuer de lui demander un soutien plus conséquent. Visiblement, ce petit chasseur était assez bas placé dans la hiérarchie des chasseurs, sinon, il aurait suspecté, comme ses pairs plus chevronnés, qu’une partie des fonds alloués aux chasseurs venaient tout droit de la cagnotte de l’ambassadrice du peuple de la nuit. Mais visiblement il l’ignorait. Soit il faisait preuve d’un sens de l’insinuation assez flamboyant, soit il l’ignorait pour de vrai. Merida penchait plutôt vers la seconde idée. Pour lui, elle était une ennemie redoutée par les sorciers. Pour quelle raison ? Elle n’était pas si menaçante que ça, ne soutenait pas officiellement les chasseurs, bref, avait réussi à se faire passer pour une vampire voulant juste améliorer les conditions de vie de sa race et favoriser son intégration dans la société. Elle avait passé un siècle à militer pour des lois, tantôt en usant de la diplomatie la plus politique, tantôt en usant d’un peu de son charme de vampire pour aider à apposer une petite signature sur un bout de papier. Comme quoi, quoi qu’elle fasse, sa réputation de femme politique se préoccupant du bien de tous était illusoire. Non, éphémère. Sans nul doute, des gens y pensaient, mais pas les sorciers. Ils n’étaient donc pas si stupides qu’ils en avaient l’air, alors.

« Je vois. Et quelle aide serais-je susceptible d’apporter à la cause des chasseurs de sorciers ? Après tout, mon seul intérêt est d’aider ma propre race à s’intégrer dans la société, pas m’afficher publiquement aux côtés d’un groupe de chasseurs. »

Si un sorcier avait pu la voir en cet instant, il en serait devenu vert de rage. Comment osait-elle dire une chose pareille, elle qui finançait la Ligue et qui tuait n’importe quel sorcier ayant eu l’audace de barrer sa route ou pouvant avoir un rapport avec le fameux sorcier de la prophétie sensé être le seul être à pouvoir la tuer une bonne fois pour toutes ? Oui, elle aurait beau faire, jamais on ne la prendrait pour une demoiselle inoffensive, une potiche décorative, un nounours qui décore dans un coin. Personne n’oubliait son âge et son vécu puisque les journalistes aimaient lui poser des questions sur ce qu’elle avait pu voir tout au long de son immortelle jeunesse. Cependant, Odessa posait une question pour le moins intéressante. Pourquoi être passé à l’ennemi ? Il suffit d’un coup d’œil pour que Merida comprenne. Un cracmol. Elle avait affaire à un cracmol. Il avait eu de la chance, sa famille l’avait aimé quand même, il n’y avait personne pour se gausser de lui comme on avait ri d’elle par le passé. Mais cela n’expliquait pas pourquoi ce gentil cracmol aimé des siens était devenu un chasseur. Un parent parti trop tôt, avait-il dit. Des sorciers avaient sans doute assassiné ses parents pour une histoire qu’elle ne connaissait pas, et la conjugaison de tout cela, du fait qu’il soit un cracmol, que ses parents soient morts et qu’il soit raillé chez les sorciers, l’avaient sans doute poussé à devenir un chasseur. Intéressant.

« Vous n’avez jamais refusé de tuer un sorcier, mais en avez-vous déjà tué un ? Pointé votre arme vers un sorcier et appuyé sur la détente, de sang-froid, alors qu’il vous regardait droit dans les yeux ? »

Avait-il déjà tué, ou était-il un beau parleur qui tentait de faire de l’esbroufe pour les impressionner ? De son côté, ça ne marchait pas. Pas après avoir assassiné de sang-froid ses propres parents et le reste de sa famille, visité et déplacé les livres des savants et les lettres des plus grands érudits de la bibliothèque d’Alexandrie, parlé avec de nombreuses personnalités ayant marqué l’histoire telles que Jeanne d’Arc, Napoléon, Guillaume le Conquérant, Richard Cœur de Lion ou Aliénor d’Aquitaine. Face à tout ça, une petite esbroufe ne faisait certainement pas le poids. Aussi, Merida décida de cesser son petit jeu et de dire très clairement à ce chasseur ce qu’elle pensait de ses recherches.

« De vous à moi, je ne fais confiance ni aux chasseurs, ni à l’Eglise, vu qu’à la base c’est elle votre grand patron, ce me semble. Pourquoi devrais-je vous aider, vous financer en or et en moyens ? Que se passera-t-il lorsque les sorciers seront tous morts sous les assauts des chasseurs ? Ceci vous semble certainement extrêmement loin, mais pour moi ce n’est pas si loin que ça, tout comme le jour où j’ai visité la bibliothèque d’Alexandrie avec mon créateur, à peine trois mois avant que cette dernière ne flambe sous les assauts des musulmans, n’est pas si éloigné que ça. »

Merida se tut un court instant, pour laisser le temps au chasseur de faire le calcul pour savoir à quand remontait exactement la destruction de la légendaire bibliothèque.

« Ce qu’il se passera, c’est que les chasseurs se retourneront alors vers les autres créatures vivant sur cette terre, à savoir nous autres vampires, et les loups-garous. Alors dans ce cas, pourquoi devrais-je vous fournir l’or et les armes que vous utiliserez demain, ou dans trois siècles, pour les retourner contre ma race ? J’ai certes l’air jeune, mais je ne suis pas stupide. Et il est absolument hors de question que je précipite mes sujets vers l’apocalypse et la mort. Les chasseurs veulent tuer les sorciers ? Vu le final de cette guerre, permettez-moi de ne pas y prendre parti. »