Il est l'heure. Il est l'heure depuis des années mais elle ne pouvait pas le savoir. Comment aurait-elle pu ? Elle imaginait tellement plus. Mais voilà, la vie et les rêves sont souvent deux choses bien incompatibles. Elle s'enveloppe dans un voile léger comme pour cacher son visage et s'en va dans la nuit. Elle semble s'enfuir de ce manoir sombre et pourtant il n'en est rien. Si tout se passe bien, au petit matin elle sera de retour. Si tout se passe bien, le soir à nouveau tombé elle s'en ira à nouveau. Ses pas menus l'emmène non loin de la riche demeure qu'elle a quitté. Elle trouve le portoloin. Tout avait été soigneusement préparé. Un sourire fugace vient sur ses lèvres. Elle est prête. Elle l'a toujours été. Elle était née pour ce moment. Alors ses doigts fins effleurent le collier en attendant que les secondes passent. Alors qu'il se met à briller, une sourde inquiétude commence à vrombir en son ventre. Elle n'a pas le temps de regretter qu'un crochet semble la prendre au nombril et elle se met à tourner, emporter dans le tourbillon magique. Alors elle sert les dents. Elle n'a jamais aimé ça, voyager par portoloin. Mais elle n'a pas le droit de transplaner : elle n'a jamais appris. Elle aurait pu prendre la poudre de Cheminette cependant elle se devait d'être présentable. Surtout ce soir, bien plus qu'un autre soir.
Le portoloin la lâche mais elle atterri dignement dans une salle vide du château de Mellow Blue Castle. D'un geste sûr elle replace sa coiffure et vérifie que son maquillage n'a pas coulé. Une dernière fois elle ressort cette feuille de papier qu'elle a longuement lu en jubilant. Froissée, le parchemin reste encore lisible. Ce sont des mots écrits d'une plume rapide, d'une plume empressée et coupable.
Je t'aime. La jeune sorcière frisonne à ces mots. Le pauvre imbécile. Aussitôt elle se reprend. Elle doit être parfaite. Alors la lettre se consume, elle réajuste une dernière fois sa robe et sort de cette salle silencieuse. Les couloirs sont vides à cette heure de la nuit. Elle fait attention à ce que ses pas résonnent doucement. Elle se demande combien de rendez-vous cachés ont lieu ce soir là. Après tout, les courtisans passent leur temps à s'intéresser aux intrigues et les amours des uns et des autres figurent aux bonnes places dans les ragots dispensés à la cours. Pour sa part, elle méprise ces apparences qui l'obligent à plier devant un roi dont le sang est moins pur que le sien. Elle secoue la tête comme pour chasser ces idées mauvaises. Pas ce soir. Surtout pas ce soir. Elle n'a pas le droit d'échouer. Sa main s'élève avec douceur et effleure la porte dans un bruit léger. Elle entre. Il est là.
" Anya..."Ce nom dans sa bouche lui semble étrange. Elle a un sourire léger, un sourire qu'il prend pour une marque de timidité. Sa main tremble alors qu'il touche sa joue. Il se remémore tous les billets doux, toutes les attentions, les regards cherchés et trouvés lors des fêtes. Il se rappelle qu'il est marié. Il se rappelle, puis il oublie. Ce soir il n'y a qu'elle qui compte. Ils ne disent rien. Le regard qu'elle lui lance semble une torture. Elle peut faire de lui ce qu'elle veut, c'est une torture. Il a déjà eut des amantes. Mais il le savait, ce n'était que des histoires d'un soir, souvent pour faire rager sa femme qu'il adorait. Étrange relation, étrange couple. Il ne lui avait pourtant encore jamais fait l'affront de préférer une autre. Cet affront, ce soir, il le fait. Le voile tombe par terre mais il n'en a cure. Il a passé des nuits et des nuits à imaginer ses formes, à les dévoiler. Il s'était torturer pendant des semaines avant d'oser lui proposer ce rendez-vous. Maintenant elle est là, tout à lui, et il reste pétrifié. Ce ne sera pas une histoire d'une fois. Ce ne sera pas une prostituée. C'est elle qui vient l'embrasser. Il en devient fou. Alors il l'embrasse à son tour. Ses lèvres ne lui suffisent plus, il veut son corps. Entre douceur et fougue il l'allonge sur le sol. Lentement il défait ses vêtements. Elle le laisse faire, le regarde faire, l'encourage à faire. Elle joue son rôle à la perfection. Alors il vient.
" Votre majesté..." ϟ ϟ
Sevastian arpentait les couloirs de long en large en attendant son frère. Il semblait préoccupé. Nikolaï le faisait rarement attendre. Il s'arrêta pour se calmer. Serrant les poing, il s'intima de respirer aussi lentement qu'il le pouvait afin d'apaiser son corps. Il détestait cela : attendre. Il avait alors l'impression d'être un homme du commun, un vulgaire roturier, ce qu'il était loin d'être. Il était l'héritier des Dolohov. Une riche partie de cette famille s'était installée en Grande- Bretagne à la montée en puissance de Lord Voldemort. Cette famille de sang pure, originaire de Russie, avait su au fil des années conserver sa pureté et sa grandeur. En tant que fils aîné, Sevastian avait été élevé pour dominer. Le jeune homme serra les dents. Son frère aurait dû être là. Il aurait dû, mais il n'était pas là. Ce n'était qu'une mission de routine pourtant. Lui avait fait sa part. Il espérait que son frère cadet n'avait pas commis une imprudente faute. Il ne supporterait pas l'échec devant Père. Mais pour le moment, ce qui l'inquiétait, c'était le retard. Père était à cheval sur la ponctualité. Serrant les poings, il se promit d'en toucher deux mots à Nikolaï quand celui-ci apparu. Aussitôt toute rancune disparue. Quand il contempla son frère, Sevastian eut un sourire. Il avait eut un peu de mal à régler son cas à ces satanés chasseurs apparemment. Nikolaï lui donna une accolade.
" Père va nous reprocher ton retard. Que c'est-il passé ?"Son cadet haussa les épaules, histoire de ne pas inquiéter son aîné. En soupirant, Sevastian se dirigea vers le bureau de Père, suivit de prêt par Nikolaï. Ils gardèrent le silence, chacun méditant sur le rapport qu'ils allaient devoir faire. Si Nikolaï n'était pas très sûr d'avoir pleinement exécuté sa tâche à la mesure de ce qu'on lui demandait, pour sa part, Sevastian savait qu'il avait fait tout ce qu'il fallait faire. Mais cela suffirait-il ? Père était fort capable de lui reprocher les fautes de son frère. Et s'il s'avisait de répliquer, il était bon pour un doloris. Après tout, c'était son devoir en tant qu'aîné de s'assurer que tout le monde marchait bien au pas, que son frère suivait les directives comme il le fallait. Il était héritier, il devait en assumer le rôle. Il n'avait jamais été question de suivre pour lui, toujours de commander. S'il n'était alors pas capable de s'assurer que son frère remplisse sa mission, il démontrait son incapacité à devenir le chef de famille. C'était ce qu'il redoutait. Lorsqu'ils frappèrent à la porte, la voix sèche de Père les accueillit.
Anya se trouvait là aussi. En sa qualité de petite soeur, elle était le joyaux de Sevastian et Nikolaï, jamais ils ne permettraient que quelqu'un la touche. Belle à ravir dans une courte robe d'été, elle se tenait droite, le regard hautain et fière. D'un regard, Père leur intima de commencer leur rapport et les deux frères s'exécutèrent. Sevastian ne put s'empêcher de tressaillir légèrement en remarquant le sourire pincé de sa soeur. Une fois n'est pas coutume, le vieil homme derrière le bureau passa les erreurs commises. Surpris, Sevastian songeait qu'autre chose se tramait pour que Père ne s'énerve pas. D'ordinaire, pour ce qui concernait les missions que la Confrérie leur confiait, il restait intransigeant. Il fallait redorer le blason des familles de sang-pure, il fallait redonner l'éclat qu'avait perdu les sorciers en acceptant les moldus. Il fallait surtout détruire cette race immonde qui se prétendait au dessus de tout, et surtout exterminer les chasseurs de la ligue. Comme au temps du Seigneur des Ténèbres, les sorciers devraient être respecter et craint, surtout les sorciers de sang pur tel quel le leur.
" Anya a de mauvaises nouvelles à nous annoncer."" Le roi commence à se lasser de moi."Les deux frères serrèrent leurs poings. Quand Père avait ordonné à la jeune femme de séduire sa majesté d'Irlande, ils avaient été rigoureusement opposé. En effet l'imbécile au pouvoir n'était pas digne de toucher au corps délicat de leur soeur. Mais ils avaient dû s'incliner devant la volonté du chef de famille. Séduire le roi n'avait rien de bien sorcier et elle s'en était tiré à merveille malgré la répugnance qu'elle ressentait envers cette tâche. Mais après un an de relation où la cours avait commencé à jaser, il lui était de moins en moins fidèle. Certes il n'avait jamais été de ces hommes qui se réservaient à une seule femme mais Anya avait été la première à survivre aussi longtemps. Les autres avaient été des histoires d'une fois ou deux, sans plus. La jeune femme sentait qu'il lui échappait doucement. Cependant leur but n'était toujours pas atteint : il n'avait jamais anoblis la famille Dolohov. Père semblait réfléchir. Au regard qu'il offrit à ses enfants, Sevastian comprit tout de suite.
" Père vous ne pouvez pas..."" Je peux, et je l'exigerais ! Anya, il faut que nous ayons un lien avec lui, un lien qu'il ne pourra détruire. As-tu compris ?""... Oui Père."Nikolaï abattit un poing furieux sur le bureau qui trembla.
" Vous ne pouvez la vendre comme du bétail ! Avec ce bâtard vous allez ternir les Dolohov !"Le sort qui le cueilli en plein ventre l'envoya s'écraser sur le mur. Une plainte sourde sortis de ces lèvres. Il se releva, furieux, essuya d'un geste rageur sa bouche d'où coulait un filet de sang et sortit en trombe du bureau non sans cesser de maudire le roi et Père. Anya avait un regard triste. Un an qu'elle offrait son corps à un homme qu'elle n'aimait pas. Elle ne voulait pas de ce lien qui ne pourrait pas se détruire entre eux. Mais Père l'exigeait. Cherchant le moindre soutien dans le regarde de son grand frère, elle se heurta à un mur de résolution. Ainsi, il lui faudrait faire un bâtard au roi, un bâtard qu'il reconnaîtrait.
ϟ ϟ
Le roi était hors de lui. Elle ne voulait pas avorter. Son ventre s'arrondissait de jour en jour mais elle se refusait à tuer l'enfant. Il avait d'abord cru qu'il s'agissait encore d'une manipulation de son père qui désirait ardemment la noblesse. Oh oui il savait, il était roi, pas aveugle, ni stupide. Cela faisait un moment qu'il avait compris qu'Anya ne l'avait jamais vraiment aimé. Après tout, elle aurait du se marier avec ce Timothy Black avant qu'il meurt assassiné par des chasseurs. C'était lui qu'elle avait toujours aimé. Mais en parlant avec elle, en la regardant poser une main douce sur ce ventre rond, il avait compris. Sa colère s'apaisa subitement. Ce qui le mettait en rage s'évanouit car après tout, c'était ce qu'il avait aimé chez Anya. Finalement la jeune femme n'était pas comme tous les autres. L'enfant, elle le voulait. Pas parce qu'il venait de lui ah ça non ! Mais parce qu'il était en elle, parce que c'était son bébé et voilà tout. Se retournant, il la contempla. Elle refusait de croiser son regard, craignant encore qu'une discussion sur l'avenir de son fils éclate. Le roi s'assit à côté d'elle et toucha le ventre de la jeune femme. Cela lui rappelait la naissance de son premier né, Gauvain. Celui ci avait un peu plus de dix ans maintenant et commençait déjà à lui poser quelques problèmes. Il caressa les cheveux de cette femme qu'il avait tant aimé et pour qui il ne restait plus qu'une certaine attirance et un profond respect. Avec une voix d'une tristesse absolue il murmura :
" Y-a-t-il eu un temps pour nous deux ?"Les larmes s'écrasèrent sur les genoux d'Anya. Ses yeux pleuraient, sa lèvres se mordit. Elle n'a jamais été quelqu'un d'indifférent. Certes elle ne l'aime pas cet homme. Certes il est sang-mêlé. Mais après tout elle s'en fiche. C'est un sorcier déjà. Elle tout ce qu'elle veut, c'est garder l'enfant. Son bébé. Elle regrette un peu. L'un comme l'autre, ils n'ont rien demandé. Elle était jeune, pleine de vie, lors de ses fiançailles. Elle voulait juste avoir une vie normale, que ses enfants grandissent, soient de fiers sorciers et puis voilà. Mais les moldus ont tué Timothy. A partir de ce moment là, elle est redescendue de son nuage. A partir de ce moment là, Anya méritait le nom de Dolohov. D'une toute petite voix elle lui répond :
" Non, votre majesté."Il soupire lentement. Il le savait, mais cela fait mal quand même. Il ne l'aime plus vraiment, mais elle lui est toujours chère. Son visage devient impassible, un peu dur mais pas méchant. Il se détourne d'Anya. Il sait qu'il doit prendre une décision. Il ne veut pa de l'enfant. Il ne veut pas d'un bâtard et pourtant... Il ne peut pas faire du mal à cette enfant qu'il a aimée. Le roi d'Irlande a un petit rire : lui, un grand souverain, incapable de statuer sur la vie ou la mort d'un être à peine né ! Sans la regarder à nouveau, il s'en va. La décision, il ne la prendra pas aujourd'hui.
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" Tiens bon Anya !"" Seva...""Anya !"Il tient sa petite main si fort qu'il a l'impression de la broyer, et pourtant elle lui échappe. Anya hurle, Anya souffre, Anya perd du sang. Ce n'est pas possible. Elle n'a pas le droit. Il jure, il crie lui aussi. Elle ne peut pas mourir. Le médicomage fait ce qu'il peut. Mais l'enfant est là trop tôt. A peine sept mois dans le ventre de sa mère et il veut déjà pointer le bout de son nez. C'est un aventurier ! Mais personne n'a le coeur à rire à cette blague. Père a tout de suite voulu qu'elle se débarrasse de l'enfant quand il a été clair que sa majesté ne conviendrait pas de le légitimer. Il était trop tard, Anya avait pris sa décision. Sevastian éponge doucement le front brûlant de sa soeur avec un torchon humide. Il n'y a personne d'autre pour le faire. Père ne veut plus entendre parler de cet enfant. Nikolaï est en mission pour la Confrérie. Il n'y a que lui. Cela fait des heures qu'ils sont là, à essayer de le sortir. Le médicomage refuse de l'ouvrir comme les moldus font et refuse de toucher à la magie : le petit est dans une mauvaise position, cela pourrait lui coûter la vie, aussi bien à lui qu'à elle. Alors elle doit endurer la souffrance. Elle a dit que ce n'était pas grave. Elle a dit qu'elle le mettrait au monde, ce bout d'homme. Sevastian lui, n'en n'est pas persuadé. Les minutes s'écoulent lentement dans les cris et la douleur. Il ne lui lâchera pas la main. L'enfant sort doucement. Finalement il viendra peut être au monde. Mais lui craint qu'en venant au monde, il ne vole la vie de sa mère. Alors il sert de toutes ses forces pour ne pas la lâcher.
Sevastian a fermé les yeux. Il ne veut plus voir. Entendre est déjà bien suffisant. Pour le moment il prie. Il prie il ne sait quoi car il ne croit en rien si ce n'est la puissance de la magie, mais il prie le monde entier : sa soeur doit vivre. Il entend alors un cris, mais ce n'est ni celui de sa soeur, ni celui du médicomage. Surpris, sa main se relâche un peu, et il ouvre les yeux. Le garçon est sorti. Tout de suite il est lavé, testé et approuvé par le médicomage qui lui enfile de quoi avoir un peu plus chaud. Anya a un faible sourire et semble sur le point de quitter le monde des vivants. Alors on lui remet le petit et soudainement son visage s'éclaire d'un soupçon de vie, avant de s'évanouir simplement. Sevastian la regarde et lui caresse les cheveux affectueusement. Elle l'a fait. Elle l'a fait. Son fils est né. Il regarde l'enfant qui tantôt braille, tantôt gazouille tranquillement. Il sait quel nom va lui donner Anya, elle y a réfléchis longtemps. Elle voulait un nom qui pourrait faire irlandais sans s'éloigner du Russe. Elle lui a demandé un deuxième prénom, à lui...
" J'espère que tu feras un bon Dolohov, Sanders... Alexei." ϟ ϟ
Être un bon Dolohov... Sanders ne sera jamais un bon Dolohov. Père le sait. Sevastian s'y échinait pourtant, mais Nikolaï le voyait bien lui. L'enfant est curieux et intelligent, mais il est trop sage, trop peu fier. Nikolaï le regarde jouer dans le parc du manoir. Il l'observe. Il n'a pas le caractère qu'il faut. Il ne cherche pas à s'imposer, il est trop calme. Certes il n'a que cinq ans, mais l'homme le sait, pour être un bon sang pur, il faut être un peu capricieux, il faut avoir ce petit quelque chose qu'il n'arrive pas à nommer et que le petit garçon n'a pas. Il est trop gentil et finalement trop intelligent pour son propre bien. Il a cinq ans ans mais on le voit déjà. C'est un rêveur. Il n'est pas bon de rêver. Sanders cours après un papillon en rigolant. Il devrait lui arracher les ailes ! Nikolaï sert les poings. La rage qu'il a dans son coeur ne lui permet aucun amour pour son neveu. Pourtant il a essayé, pour Anya il a vraiment essayé. Mais rien à faire. Cet enfant devait les mener aux portes de la noblesse et il n'a rien fait de tel. Le roi ne l'a pas reconnu, ne l'a pas légitimer. L'honneur de sa soeur a été bafoué, mais plus que l'honneur, sa vie entière a été bafouée.
Quand Sanders est né, quelque chose s'est mal passé. La jeune femme a perdu trop de sang, s'est trop fatiguée à mettre son fils au monde. En venant à la vie, le petit garçon lui a volé ses jambes. Elle ne marchera plus jamais et même la magie ne peut rien y faire. De plus elle ne peut plus passer une journée entière réveillée. La fatigue joue sans cesse avec elle et ne la lâche jamais vraiment. Sevastian et lui ont tout essayé. Même Père avait ravalé sa colère pour aider sa fille. Mais rien n'y faisait, aucun spécialiste ne semblait comprendre. Mais Anya disait tout le temps que cela n'avait pas d'importance. Le petit, elle l'aimait vraiment. Au début elle refusait qu'il dorme ailleurs que dans sa chambre. Mais quand à quelques mois Sanders a fait lévité sa mère, Sevastian a décidé qu'il était temps de le mettre tout seul dans une chambre. Être handicapée et avoir un bébé sorcier, c'était loin d'être sans danger. Ensuite elle a eut du mal à le laisser être éduquer par un précepteur. Elle préférait que Nikolaï et Sevastian lui enseigne la vie. C'est Sevastian qui lui a appris à marcher et qui commence à lui apprendre à lire. C'est Nikolaï qui essaye de lui montrer comment contrôler un peu plus sa magie. Mais Sanders la laisse éclater à n'importe quel moment. Il faut dire qu'à cet âge là, la magie amuse et on ne comprend pas pourquoi il faut être prudent.
Nikolaï voit Sanders enfourcher son balais-jouet. Cet enfant sera un bon sorcier, Sevastian fera tout pour. Mais est-ce qu'il sera un bon Dolohov. Lui a déjà la réponse : jamais. Alors il se venge sur le petit. Anya a souffert par sa faute. Anya a dû endurer sa majesté pendant plus d'un an, et tout ça, pour rien. Il passe sa frustration sur le gamin, d'autant plus qu'il n'y a que lui pour le faire. Sevastian semble s'être prit d'affection pour lui, et même Père ne le dénigre pas. L'enfant vient alors vers lui, une fleur à la main. Il a un sourire radieux, ce qui énerve d'autant plus son oncle. Il n'a pas le droit d'être heureux après ce qu'il a fait à sa mère. Il n'a pas le droit d'être heureux alors qu'il ne sera jamais un bon Dolohov. Il n'a pas le droit d'être heureux alors que Nikolaï fait tout pour que ce ne soit pas le cas. Mais le gamin semble ne jamais lui en vouloir. A chaque fois il revient vers lui en souriant, à chaque fois il fait tout pour ne pas l'importuner, pour être le meilleur comme il se doit. Oui, Sanders aurait tout pour être ce que le destin lui avait promis, tout, sauf la volonté. Nikolaï le regarda lui offrir une violette, un air interdit sur le visage. Il la prit entre ses doigts et la fit faner. Ensuite il gifla l'enfant.
" T'ais-je demander de t'extasier devant les fleurs ?"Sanders ne répond pas, il secoue la tête. Il n'a même pas une larme dans les yeux. Du moins c'est ce que croit Nikolaï. Mais ses larmes, elles sont dans son coeur. Alors il rentre au château. Il ne sait pas pourquoi son oncle lui en veut. Il a comprit qu'il ne l'aimait pas, pourtant il n'a rien fait. Il en est venu à penser que c'était vraiment sa faute ce qui est arrivé à Maman. Mais il ne l'a jamais voulu. Il voudrait s'excuser mais il n'y arrive pas. Il est trop petit, il ne trouve pas les mots, il ne comprend pas tout. Nikolaï le déteste, Grand-Père ne lui adresse quasiment pas la parole et Sevastian s'évertue à lui dire que ceux qui n'ont pas de magie sont à méprisé. Il n'y a que Maman qui ne cherche pas à le dresser, et qui l'aime sans condition. Son père à lui, il ne l'a jamais vu. Il sait que c'est le roi. Du moins il a cru le comprendre, personne ne s'est donné la peine de le lui confirmer. Il va dans sa chambre et attrape un livre. Il ferait tout pour que Sevastian soit fier de lui alors il déchiffre péniblement les lignes. Il aime bien ça, lire. Il se force un peu parfois, surtout que les sujets ne sont pas toujours plaisants. Son précepteur est intransigeant avec lui mais Sanders apprend avec joie. Quelques minutes à peine se sont écoulées que Sevastian frappe à sa porte et entre.
" Sanders, Nikolaï m'a dit ce qu'il s'était passé."Le petit baisse honteusement les yeux. Il ne savait pas qu'offrir une fleur était quelque chose de mal. Sevastian en offre toujours à sa mère et ça la fait sourire alors il pensait que pour une fois Nikolaï sourirait en le regardant. Mais il n'a récolté qu'une joue rouge et des larmes dans le coeur. Il regarde son oncle en silence et pour la première fois la colère le prend. Il n'a rien demandé lui, il a toujours fait ce qu'on attendait alors pourquoi ils ne le laissent pas tranquille ? Il est gentil, calme, il apprend alors qu'est-ce qu'ils veulent de plus ? Sanders est en colère, Sanders ne sait plus. Sevastian a l'air fâché, un peu déçu, mais c'est lui qui devrait l'être. Il vit dans une immense maison où ses pas résonnent au son de sa solitude. Il n'y a pas d'amour autour de lui, seulement de l'intransigeance. Le petit garçon ne se sent pas aimé. Et pour la première fois il a envie de pleurer devant ses oncles. Pour la première fois il veut montrer ses larmes du coeur. Alors il regarde Sevastian avec rage. Il le regarde et les larmes coulent le long de ses joue rebondies. Il a tellement mal au coeur. Il ne sait plus ce qu'il fait ni ce qu'il est vraiment, il n'a plus aucun repère. Alors il tend ses bras devant lui et se met à courir pour pousser son oncle. Celui, surpris par cette marque d'agressivité inhabituelle se laisse avoir et tombe sur les fesses. La colère monte tout de suite.
" Sale môme !"L'homme l'attrape et lui décoche une gifle qui résonne dans la pièce. Une claque comme ça, ce n'est pas la première fois qu'il s'en prend une. Mais son oncle est loin d'en avoir fini. Il le frappe encore et encore, non pas jusqu'à ce que le petit s'excuse, mais jusqu'à ce qu'il supplie. Et Sanders hurle. Il a cinq ans, il ne comprend rien, il se soumet. Sevastian l'envoie dans le mur. En essayant de se rattraper, son bras se brise. Le crie qui sort de sa bouche n'est en fait qu'un gémissement. Il les déteste tous ! Autant qu'ils sont !
ϟ ϟ
Les cubes volent doucement autour de moi. Ils n'ont aucunes couleurs, ils sont fades, sans intérêt. Ce sont de vieux cubes de bois abîmés qui n'offrent pas de sourire et aucun réconfort. Ils devraient être des jouets amusants. Il n'en n'est rien. Alors ils volent lentement, parcourant un cercle invisible parfaitement dessiné autour de mon corps en dix secondes exactement. Pas une de plus, pas une de moins. Ils volent pour me distraire. Ils volent pour que j'oublie. Les genoux enfermés dans les bras, mes mains crispées agrippant mes épaules, le menton négligemment posé sur mes coudes, je les regarde se suivre les uns après les autres. Mener cette tâche à bien me permet de ne pas exploser, de ne pas pleurer, de ne par hurler. Ce n'est pas facile. Il faut que je me concentre pour que les cubes ne retombent pas sur le sol, pour que je puisse continuer de compter régulièrement les dix secondes pour chaque cube. Soudainement ils tombent dans un bruit mat les uns après les autres. Rien à faire, je ne parviens pas à oublier. J'enfouis mon visage dans mes bras. Mes épaules commencent à tressaillir. J'éclate en sanglot. Je me souviens.
Il y a tout juste une semaine, j'ai eu sept ans. Sept ans, l'âge de raison. Mon corps tremble tout entier à l'évocation de ce jour. Les larmes s'écrase contre ma peau et je les laisse couler jusqu'au sol. Il me semble que je suis inconsolable. C'est le cas depuis que la douleur est là, ancrée dans mon ventre. Elle ne cesse de grandir et de me tirailler. Ce jour là, mon oncle Nikolaï a déclaré qu'il était temps pour moi de me montrer digne de mon sang. Traîner hors du lit à l'aube, aussitôt habillé, nous sommes partis. Mon ventre criait famine mais je le faisais taire. Nikolaï n'avait jamais montré qu'il pouvait être patient ou bien tolérant et les jérémiades d'un enfant de sept ans l'importunaient plus qu'autre chose. Aussi je m'était résolu à garder un silence complet, préférant une faim dévorante à un passage à tabac en bonne et due forme. Je serrais les dents et lui emboîtais le pas. Nous transplanâmes. L'effet du sort sur mon petit corps d'enfant me laissa sans souffle, les poings refermés, les jointures blanches sous la douleur. Pas un bruit cependant ne sortit de mes lèvres. Sevastian nous attendait à une centaine de mètres d'une maison perdue au milieu de nulle part, un drôle de sourire sur les lèvres. Nikolaï hocha la tête en le voyant puis me poussa en avant.
" Sept ans. Quel âge avait père quand il nous montra la mort ?" demanda Sevastian.
" Sept ans" répondit son frère.
Je m'étais mis à trembler légèrement. Il ne faisait pas particulièrement froid, aussi je ne pouvais me réfugier derrière un frissonnement passager. Sevastian le remarqua. Je vis son visage s'assombrir immédiatement. Il me décocha une claque monumentale qui résonna dans la campagne. Je ravalais mes sanglots et laissais ma joue rougir de l'affront. Mes oncles se dirigèrent vers la maison d'où on pouvait voir par une fenêtre que les propriétaires mangeaient tranquillement. J'apercevais deux jeunes enfants avaler à moitié endormis leur céréales. Nikolaï défonça la baie vitrée du salon d'un coup de pied phénoménal. Sevastian me força à entrer et alors l'enfer se déchaîna. D'abord vint le petit garçon. Les cheveux bruns, maigre comme un clou, mon âge à peu prêt, suivi de prêt de sa petite soeur aux cheveux plus foncés, déboula dans la pièce pour voir d'où venait le vacarme. Un éclair vert envahis la pièce et leur deux corps retombèrent mollement sur le sol. Aucune vie ne les animait plus. Le hurlement qui se bloqua dans ma gorge résonna dans toute la pièce, exprimé par les parents qui entraient à leur tour. La femme pleurait à chaudes larmes en tenant son ventre rond comme un ballon. L'homme, le visage déformé par la haine, se jeta sur Nikolaï qui lui infligea le doloris. Je voulu détourner le regard mais Sevastian me força à regarder. Non content de le faire souffrir, je le vis sortir un couteau. Les yeux de la femme s'agrandirent et elle se rua follement pour sauver son mari. Un coup de pied l'accueillit sur son ventre.
Ce fut un déferlement de souffrances. Mes mains vinrent se plaquer contre ma tête, ma bouche s'ouvrit pour laisser passer un long hurlement et mes jambes cédèrent sous mon poids. Il me semblait que mon corps explosait. Une douleur sans nom avait prit place dans mes entrailles, les tordant sans pitié. Les vagues de douleurs atteignaient mon crâne, menaçant de le faire imploser. Et je hurlais toujours, couvrant les cris de la femme qui tenait son ventre, terrifiée, du sang coulant abondamment entre ses jambes. Sa terreur se répandait en moi, comme sa douleur. C'était comme si ce corps n'était plus à moi, mais à elle, comme si la douleur avait jaillit de son être pour prendre le mien, faute de pouvoir s'exprimer sur une seule personne. Mes oncles se mirent à hurler mais je n'entendais rien, je ne voyais plus rien que du sang et des larmes. Il y eut à nouveau un éclair de lumière verte et le maris s'effondra. La vie de l'enfant à naître s'estompait doucement. Je sentais ses émotions confuses s'en aller les unes après les autres. Et puis ce fut le silence.
" Crétin !"On me prit par le col et je me relevais. Le regard vide, je suivis mécaniquement mes oncles. Le fantôme de la douleur siégeait en moi. Mais plus qu'une souffrance, c'était le silence qui heurtait mon coeur. Le silence total de cette femme qui m'avait offert ses sentiments, qui me les avait imposé. Il me semblait maintenant être au bord d'un vide froid. Le vide de la mort. Et peu à peu vinrent les émotions du monde. Une colère sourde et froide ainsi qu'un mépris évident siégeait dans le coeur de Sevastian et Nikolaï. Ces ressentiments me prirent la gorge et quelques larmes coulèrent silencieusement le long de mes joues. Sevastian me secoua violemment par les épaules.
" Bordel c'est pas vrai ! Tu vas la fermer ! Ils n'étaient rien tu m'entends ? Rien ! Des moldus ! Des putains de moldus !"La gifle cueilli mes larmes et les enleva. Nikolaï rigola et j'esquissais un sourire malsain. Ce n'était pas ma joie, c'était la sienne. Alors Sevastian sembla satisfait. Il eut un regard approbateur quand je rigolais comme son frère. A mes oreilles ce rire sonnait froidement, mais c'était bien le mien. Cependant il n'exprimait rien de personnel. Je riais avec dégoût.
Mon corps se calme doucement. Je me laisse tomber sur le sol, les bras en croix. Ma respiration s'apaise doucement. Les larmes s'évaporent. Je n'ai toujours pas compris. Je ne comprendrais jamais pourquoi tant de violence existe. Ca fait mal. Ca fait tellement mal. Jamais je ne pourrais leur dire combien ça m'a fait mal, ils ne méritent même pas de savoir. Jamais je ne le dirais. Et doucement, les yeux fixés sur le plafond, je murmure :
" Ils n'étaient pas rien. Ils étaient la vie...' ϟ ϟ
Je regarde sa main blanche tomber sur le côté. J'ai neuf ans. J'ai neuf ans, mais je sais déjà. J'ai neuf ans et ce que je sais, c'est qu'elle m'a laissé tomber. Anya Dolohov est morte. Voilà, il n'y a pas grand chose de plus à dire. Elle vient tout juste de mourir. On s'y attendait, le médicomage venait tout les matins et tous les soirs. Il ressortait avec une tête triste et souriait en me disant toujours : ça va aller. Je savais qu'il mentait. Son coeur me le disait. Il avait déjà abandonné. Moi je le savais, mais je ne disais rien. Sevastian et Nikolaï m'aurait traité de menteur. Je ne leur ai jamais dis ce qu'il s'était passé il y a deux ans. Je ne le dirais à personne. C'est mon secret. Sa main n'est pas encore froide. Je la regarde en silence. Bientôt la pièce se rempliera de bruits. Pour le moment je suis seul. Le médicomage est parti les prévenir. Je ne pleure pas, je ne frémis même pas. Son coeur est froid. Il n'éprouve plus rien. Je l'ai su avant tout le monde qu'elle mourrait ce soir. Je l'ai su, et je n'ai rien pu faire. J'ai l'impression que mon coeur est tout dur et qu'il va exploser. C'est de ma faute, comme toujours. Je ferme ses yeux avec une douceur infinie. J'ai le coeur au bord des lèvres mais c'est un coeur gelé. Il ne pleure pas, il contemple seulement son oeuvre. Le tristesse, la douleur et la colère se rapproche doucement. La tristesse entre sous les traits de Grand-Père, la douleur a pour visage Sevastian, et Nikolaï prend pour modèle la colère. Ils la regardent en jurant. Moi je ne bouge pas, je reste immobile, je ne fais rien du tout. Grand-Père s'en va, Sevastian aussi. J'ai envie de leur hurler de ne pas me laisser seul. Je hurle. Mais ils n'entendent pas, parce que je n'ouvre pas la bouche. Il n'y a que Nikolaï, moi et le cadavre de maman.
" C'est de ta faute tout ça. TA FAUTE ! Tu nous as servis à rien ! Sale bâtard !"Je le savais déjà. Nikolaï ne m'a jamais aimé. Moi je savais que ça finirait comme ça. Maman allait m'abandonner et Nikolaï me haïrait tellement qu'il n'aurait plus aucun contrôle. Sa haine me fait mal. Je ne bouge pas. Je regarde Maman. Il semble qu'elle dort. Elle est toujours aussi belle. La colère monte encore d'un cran. Je tremble. Mon oncle continue de hurler. Je ne répond rien, je n'ai rien à dire. Son poing m'atteint en pleine mâchoire. La douleur ne se fait pas attendre, elle est vive et je gémis. Maintenant je sais encaisser. Il se défoule un peu, j'évite tant que je peux, mais pas trop : ça le mettrait hors de lui. Un coup de pied dans le ventre et je hurle. Du sang coule sur mon menton. J'ai mal au ventre. Mal de la douleur qu'il y a mise, mal de sa colère que je ressens, mal de Maman qui m'a laissé tomber. Soudainement il sort sa baguette. Mes yeux s'agrandissent de frayeur. Non... Non, pas ça ! Je me relève en titubant. Je lève une main comme pour me protéger, futile tout ça !
" Endoloris !"Mon petit corps tombe sur le sol, pris de convulsion. Il me semble que chaque nerfs est irradié par la souffrance. On me piétine, on me brûle, on me noie, on me frappe, on me découpe, on m'électrocute, on me dépèce, on m'éviscère, on me lacère, on me griffe, on me gèle, on me tue... Je hurle. Je hurle et je pleure. Le sort cesse quelques instants après. Je suis un être secoué de tremblements incontrôlables, encore sous l'emprise d'un fantôme de douleur. Nikolaï rigole. Le corps sans vie de Maman est à côté et lui il profane sa mémoire en déchargeant sa douleur sur moi, son fils à elle, son enfant, sur moi, son neveu, son sang. Un clac retentit dans la pièce. Je lève un regard tremblant. L'homme a fait apparaître un fouet. J'essaye de reculer mais je ne fais que me tortiller sur le sol. Le premier coup part et mon t-shirt se déchire, emportant avec lui un peu de chair et de sang. Le hurlement qui sort de ma bouche me semble celui d'un animal. Nikolaï frappe encore et encore, j'ai le dos en lambeaux. Il me semble que c'est le septième coup quand j'entend le fouet claquer mais la douleur ne vient pas. Mes yeux sont flous, je vais m'évanouir. Je crois voir Sevastian, un bras levé, le regard dur. Je sens une immense compréhension et un reproche contradictoire. Je...
ϟ ϟ
Elle est morte. Il l'a apprit à peine quelques heures après. Elle est morte. Il se mordille les lèvres sans savoir trop quoi faire. Il a présenté officiellement ses condoléances à la famille Dolohov mais il sait que maintenant il doit prendre la décision qu'il n'a pas prise des années auparavant. Il tourne en rond. Son héritier à vingt ans maintenant, ce n'est pas son bâtard qui lui fera de l'ombre. Il a de temps en temps demandé des nouvelles de l'enfants. Il semble qu'il soit un gamin doué et intelligent mais qu'il n'ait pas le caractère de la famille. Quelque part le roi est soulagé. Il ajuste ses vêtements. La cérémonie est tout à l'heure, et il devra annoncer sa décision. La cours jasera. Mais la cours à toujours jasé. Quelque chose lui dit de prendre l'enfant avec lui, de le légitimer, et autre chose l'en empêche. Gauvain est à peine revenu de son voyage, il ne peut pas se permettre de le reperdre. Acceptera-t-il ce gamin tomber de nulle part ? Lassement sa majesté attrape une pomme dans une corbeille et croque dedans. Le goût est délicieux et pourtant elle lui parait bien fade.
" Votre majesté, il faut partir !"" J'arrive."Il renvoie le domestique d'un geste impatient et se souvient de cette jeune femme venue le trouver au coeur de la nuit. Elle était belle à ravir ce jour là. Il a cueilli la fleur sans penser aux épines. Il l'a aimé, vraiment. Pendant un an il a délaissé sa femme qu'il adorait pourtant, pour cette Anya. Mais Anya est morte maintenant, et puis tout ça c'est du passé. Perdu dans ses pensées il se retrouve aux funérailles. Mécaniquement sa majesté prononce un discours en l'honneur d'une grande sorcière. Les mots semblent sortir de sa gorge et pourtant il sait qu'ils ne sont pas appropriés. Soudain il remarque une absence. Il n'est pas là. Tout le monde a une tête attristé. Le roi s'éclipse. Trouvant un domestique dans le manoir des Dolohov, il demande où se trouve le petit. On lui indique sa chambre. Il monte. Il ne sait pas pourquoi mais son coeur le pousse à le faire. Il allait presque repartir en laissant le gamin, en l'oubliant. Et puis touché par quelque chose, son absence peut être, il a renoncé à renoncer. L'enfant de neuf ans est dans un sale état. Couché sur le ventre, des bandages sur le dos, il se relève tout de suite quand il entend les pas. Il regarde, curieux mais silencieux, l'homme qui s'avance vers lui.
" Dis moi mon garçon, sais-tu qui je suis ?"" Vous êtes le roi votre majesté."" Hum."" Vous êtes vraiment mon père ?"L'enfant a l'air de souffrir, mais il a également l'air de s'en moquer. Cela lui plait. Sa majesté le contemple. Il lui ressemble un peu, ainsi qu'à sa mère, un parfait mélange. Il hoche la tête, oui, son père, c'est bien lui. C'est une drôle de bouffée d'amour qui lui prend le coeur. Sanders la ressent. Une larme coule le long de sa joue. Une deuxième s'en suit. Il n'avait pas pleurer quand sa mère était morte, du moins pas pour elle et le voilà en larme. Il se reprend rapidement néanmoins.
" Je suis désolé votre majesté."Surpris, l'homme lui ébouriffe les cheveux. Ce petit bout d'homme, c'est son fils. S'il ne l'avait pas reconnu à la naissance pour ne pas se rappeler cette déception, maintenant cela lui apparaissait aussi limpide que de l'eau de roche. Non, il ne pouvait décemment pas le laisser là. D'un coup de baguette magique il assembla toutes les affaires de l'enfant et les fit disparaître. Elles seraient maintenant à Mellow Blue Castle.
" A partir de maintenant tu m'appelleras Père. A partir de maintenant tu es Sanders Tudor, prince d'Irlande." ϟ ϟ
Sanders a treize ans maintenant, bientôt quatorze. Dans le Poudlard Express il regarde les élèves monter en silence. Il est heureux car il a attendu ce moment depuis longtemps. Gauvain lui a dit qu'il avait de la chance car lui n'y est pas allé. En songeant à ces dernières années, le jeune adolescent retrace son parcours. Arrivé comme une pauvre chose à la cours d'Irlande, il a été l'objet de mécontentement et d'attendrissement. A l'étonnement de tous, Gauvain l'a tout de suite pris sous son aile. Les deux demis-frère, prince héritier et prince d'Irlande, s'entendent à merveilles. Le roi a initier Sanders à la cours, il lui a payé les meilleurs précepteur, refusant de le faire aller dans les classes communes pour moldus et sorciers. Il n'aurait pas la même éducation que l'héritier mais il fallait quelque chose à la hauteur d'un prince. Le jeune garçon en a étonné plus d'un. Intelligent, curieux, observateur et surtout compréhensif, il apprenait beaucoup plus vite que Gauvain qui leur avait donné du fil à retordre. Le train démarre et des élèves lui adressent la parole. On le reconnaît comme le prince Sanders Tudor. Il s'est habitué maintenant.
Alors que les paysages coulent derrière la vitre, le rire résonne dans le wagon. Ils ont déjà tous mis leur uniforme. Le jeune homme commence à sentir une boule dans le creux du ventre. Il ne sait pas dans quelle maison il sera. Soudainement Poudlard apparaît et un sourire se dessine sur ses lèvres. Le château impose sa masse aux yeux des enfants qui vont apprendre en son sein. S'il l'avait déjà vu sur des photos, Sanders trouve qu'il est encore plus impressionnant maintenant. D'un oeil inquiet il regarde sa main qui tremble. Gauvain aurait-il eut peur ? Il secoue la tête : son frère n'a peur de rien, son frère, c'est une tête brûlée. Il respire doucement pour se calmer mais rien à faire, son coeur tambourine comme un fou dans sa poitrine. Avant qu'il ait eut le temps de s'en rendre compte, il avait traversé le lac sur les barques et avait atterris dans la Grande Salle, assis sur un tabouret, le dos droit, le Choixpeau miteux sur ses cheveux en bataille. Le Choixpeau murmure. Il hésite. Poufsouffle ? Serdaigle ? Sanders hoche la tête, tant qu'il a des amis et tant qu'il peut apprendre. Le Choixpeau rigole : justement... Mais la curiosité de l'enfant l'emporte.
" SERDAIGLE !" ϟ ϟ
" Optimal, Optimal, Optimal, Optimal... Et ça continue. C'que t'es barbant Sanders !"Gauvain me prend dans ses bras, me félicite. Je souris. J'ai vingt et un an. Maintenant je dois lui dire que je pars, comme lui est parti. Je dois lui dire qu'une fois de plus, un prince se fait la malle. Il a trente-deux ans. Il a déjà des enfants. Je lui dis que je m'en vais. Son regard s'assombris. Je sais qu'il aimerait faire de même, qu'il aimerait repartir, il ne peut pas. Je lui dit que je reviendrais dans quelques temps, je ne sais pas encore combien, on verra. Il ne répond rien. Il me demande avec qui je pars, je répond que je pars seul au début, mais que Rose me rejoindra. Alors il éclate de rire. Il sait pour Rose et moi. Rose, c'est une sorcière que j'ai rencontrée à Poudlard. Rose, j'arrive pas à lui dire que je l'aime comme un fou. Il me dit de partir maintenant, que c'est le bon moment. Alors que je fais mes affaires, je me demande quel aurait été ma vie si j'étais resté au manoir, si j'étais Sanders Dolohov ou pire Sanders Fitz. Les Dolohov ont eut ce qu'ils voulaient, la noblesse : vicomte et vicomtesse. Il y a cinq ans, Nikolaï est mort, tué par des chasseurs il parait. Grand-Père était mort deux ans avant. Il ne reste que Sevastian. Je lui envoie des lettres rarement Il me répond. Je sais qu'il aurait préféré que je sois un Dolohov mais voilà je suis un Tudor. Je sais qu'il ne perd pas espoir mais je ne suis pas comme lui : je ne pense pas que les moldus soient des êtres inférieurs, je ne pense pas qu'être magique nous donne le droit de disposer de la vie ou de mort de ceux qui sont dépourvus de magie.
Un sourire vient sur mes lèvres. Je suis sorti de Poudlard et je me lance sur le chemin d'une grande aventure. Je vais voir le monde de mes propres yeux et me faire une idée. Père n'approuverait pas, mais voilà, il n'est plus là pour le dire. Tristement je songeai qu'il ne saurait jamais que j'ai obtenu les notes maximales dans toutes les matières, que j'ai été préfet en chef et attrapeur de l'équipe de Serdaigle. Il n'a pas eut le temps de savoir. Tristement je fini mon sac. Je regarde les quelques parchemins qui volent ici et là sur mon bureau. Il y a quelques lettres de félicitations et des lettres de fans. J'ai commencé à écrire il y a quatre ans. Bien que mon premier texte soit un texte théorique sur la métamorphose qui m'a permit de publier dans le
Mensuel de la Métamorphose et m'a ainsi décerné le prix du meilleur jeune espoir, je n'ai pas écrit que des essais sérieux. A ce jour je compte un recueil de poèmes, un livre de contes traditionnels et un roman de société ainsi qu'une multitude de brouillons et projets. Je vais parcourir le monde et en ramener encore plus d'idées.
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Le monde s'est offert à moi. Rose est enceinte. J'ai vingt quatre ans. Je vais être médicomage.
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Les gouttes tombent silencieusement sur le bois poli. Mon coeur est froid. Son coeur est froid. Je me sens vide, pris d'une extrême lassitude et l'envie d'aller dormir me submerge. J'ai envie de sombrer dans le sommeil, de rêver et de ne jamais me réveiller. Le monde s'est bien foutu de ma gueule. Rose n'est plus là. Les Chasseurs l'ont tué, l'enfant dans le ventre. Le monde s'en fou, continue de tourner. La cours jase. Ils m'énervent. La fiancée du prince est morte. La seule chose qui les intéresse c'est de savoir qui l'a tuée et non qu'elle est morte. Ils se fichent tous de la douleur. Mais la douleur, elle est en moi. J'ai mal au coeur, mal au ventre, mal jusqu'au plus profond de mes os. Le cercueil disparaît sous terre doucement. Autour de moi ils s'en vont tous. Je reste seul avec cette souffrance. Ca ne va pas. Je n'y crois toujours pas. Tout allait si bien. Nous allions nous marier. Nous allions vivre ensemble, avoir notre famille. Nous allions...
Rose A. Winter. Les mots sur la pierre tombale me font l'effet d'un couteau assaillant sauvagement mon coeur. J'ai envie de vomir. Je tombe à genoux et éclate en sanglot. Les cailloux sur le sol me rentre dans les genoux mais je reste là, prostré. La pluie m'a trempé jusqu'aux os, mon corps frissonne et tremble. Je suis immobile. Les minutes glissent autour de moi et je ne les regarde pas. Il me semble que le monde s'est arrêté. La douleur s'en va doucement pour faire revenir le vide. Je n'ai plus faim, plus froid, je ne suis plus las, je n'ai plus mal. Je suis là, tout simplement. Une coquille vide. Une satanée coquille vide. Je n'ai plus de conscience du temps qui passe. La seule chose qui s'impose à moi c'est cette réalité dure et froide, cette réalité que je n'arrive pas à affronter. Je n'ai jamais été très costaud physiquement bien que je puisse courir des heures. La réalité, elle m'a mis au tapis et ça fait longtemps. Et puis la douleur revient par vague, sans pour autant chasser le vide. Elle ne m'abandonne pas. Elle ne me laisse pas tranquille. Et un hurlement sort de ma gorge, déchire mes cordes vocales. C'est le désespoir même qui a prit ma bouche. Le crie se brise et devient un gémissement, le gémissement se tait et meure en un souffle.
Une main se pose sur mon épaule. Je n'ai même pas sentis la personne arrivé. Une vague de compassion me submerge. Je connais ce style de sentiment. Je n'ai pas besoin de me retourner. Deux bras solides m'entourent et me soulèvent. Je me laisse faire comme une poupée de chiffon. Je n'ai plus de force de toutes façons. C'est comme si toute volonté était partie loin. Seule reste l'amertume de la vie. Gauvain est venu lui même. Il me porte lui même. Je me laisse trimbaler comme un vulgaire sac à patates. Ce ne sont pas ses bras qui m'apaisent mais son coeur. Il met un baume léger sur mes plaies. Ça ne suffira pas mais ça me permet de me calmer un peu. Il m'allonge dans mes appartements en gardant le silence. Il ne me fait pas la morale, il ne me dit pas que je dois me ressaisir. Il me dit juste que ça faisait cinq heures que l'enterrement était fini, qu'il m'a laissé seul parce que j'en avais besoin et que maintenant il est là. Je le laisse parler. Il me raconte tout et n'importe quoi. Ça n'a pas vraiment d'importance, moi je m'accroche au son de sa voix.
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" Rejoins la Confrérie."Sevastian regarde le jeune homme avec un sérieux désarmant. Il veut saisir cette chance. Les chasseurs ont tué sa femme et son fils. Les chasseurs ont tué Père et Nikolaï. Sevastian a vieilli mais n'a pas changé. L'homme qu'il a en face de lui, il l'aime, à sa manière. Il le veut à ses côté, dans la Confrérie. C'est un sorcier doué, peut être pas un sang pur, mais un sorcier tout de même. Il fera tout pour l'avoir. Après tout c'est là qu'est sa place, et non ce simulacre de vie qu'on lui a donné, vie de Prince. Mais Sevastian sait aussi qu'il va refuser. Il le connait, Sanders. Il sait qu'ils sont différents. Pourtant il est prêt à être violent. Il ne sera même. Il contemple le visage de son neveu. Il a ses traits. Ceux de ce roi qu'il a hait, ceux de cette soeur qu'il aimait. Anya... Elle aussi était différente, un peu. C'était une Dolohov quand même. Sanders est un Tudor jusqu'aux bout des ongles et à la fois il n'est personne. C'est un Fitz, un peu un Dolohov. C'est un être à part.
" Je suis désolé."Sanders se lève et commence à s'en aller. Sevastian ne fait rien pour l'en empêcher. L'un comme l'autre le sait, leur prochaines rencontres seront explosives. L'un comme l'autre le sait, ils s'opposeront jusqu'à ce que l'un des deux cède. Si le jeune homme n'était pas un personnage public, peut être aurait-il même pris le risque de le séquestrer. Il n'a pas peur de lui faire mal, tant qu'il rentre dans le droit chemin après. Mais il ne peut risquer d'être découvert. Sevastian sait qu'il ne le trahira pas, qu'il ne le dénoncera pas. Il n'a pas de preuve formelle de toutes façons, mais chuchoter à l'oreille d'un roi donne tout de même pas mal de pouvoir. Le Dolohov frisonne. Il sait que cela peut tourner au vinaigre. Il sait aussi que cela ne se terminera pas forcément joyeusement.
ϟ ϟ
" Pitié Gauvain soit un peu sérieux ! Tu ne peux pas déclarer la guerre à la Grande Bretagne sous prétexte qu'un membre du gouvernement a laissé échappé qu'il t'avait trouvé plutôt risible lors de ton dernier discours !"" Je suis on ne peut plus sérieux !"Les yeux au plafond je soupire.
" Rien que le mois dernière je t'ai trouvé deux bâtards ! Une fille de trois ans et un garçon de sept ans. J'ai dû essuyer ta catastrophe diplomatique avec l'Inde, ta fille Katerina était malade, je l'ai soigné mais tu n'es même pas allé la voir, j'ai essuyé les plaintes de ta femme quand à son budget shopping, et pour finir je t'ai trouvé complètement bourré dans ta salle de bain pas plus tard qu'hier !"Il ne répond rien, seulement un petit sourire. Je déteste quand il fait ça.
" T'es pas drôle."" Je suis pas là pour ça bordel ! Oh et puis débrouille toi tout seul !"Je claque la porte. Je suis énervé. Un peu. J'ai trente quatre ans, Gauvain quarante cinq, et si il gouverne bien, c'est un père effroyable et ses caprices me rendent fous. Mais voilà, je suis conseiller du roi. Conscience plutôt ! Je suis aussi médicomage de la cours et toujours écrivain à mes heures perdues. Voilà. J'ai trente quatre ans et j'ai appris que la vie continuait. J'ai appris qu'il fallait profiter de chaque instant et sourire au monde. Je rejette la violence et les actes extrémistes. J'aimerais bien que le monde arrête de se taper dessus. Je me sens un peu responsable. Je n'ai rien fait pour. Je suis né, voilà tout. Comme pour maman. Je suis né, goutte d'eau dans l'océan. Mais qu'est-ce que l'océan sinon une multitude de gouttes d'eau ? J'ai moi aussi ma propre influence. Et en tant qu'empathe, je ressens les souffrances du monde. Ça ne peut plus durer.
Je l'ai décidé : la douleur est mon fardeau.
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L'enfant a neuf ans maintenant. Un jour il tuera son père. C'est pour cela qu'il vit, c'est ce qu'on lui a toujours dit. Ensuite il tuera d'autres sorciers, d'autres monstres. Mais d'abord son père. Il n'a que neuf petites années pour le moment. Mais il grandit patiemment...